HISTOIRE ZEN
C'est un grand malade. Il est malade ainsi depuis qu'il est tout petit. Aussi, il s'est mis en tête de vouloir guérir, le plus vite possible évidemment, afin d'être enfin comme tous les autres, fort en santé et, pense-t-il, plus reluisant.
Il parcourt le monde et rencontre des savants savants, des médecins docteurs, des charlatans mais aussi des gens honnêtes comme il le faut, des intelligents sans diplômes et des diplômés surprenants par leurs bêtises. Il rencontre donc bien du monde avant de le rencontrer Lui, le maître vénérable.
D'abord, il ne le reconnait point. On ne reconnaît jamais les maîtres vénérables car ils se cachent souvent sous des traits ordinaires de gens ordinaires. Comme il y a beaucoup d'ordinaires gens et bien le succès de ce camouflage est vraiment surprenant.
Enfin, parce qu'il a beaucoup voyagé, il remarque que cet homme possède plus de sagesse qu'on peut, aux premiers abords le croire, aussi il ose demander sa guérison
"Je suis, avoua le malade au maître, un malade. Et je veux guérir. J'ai parcouru des milles et des milles pour vous trouver. Dîtes-moi, existe-t-il un remède, quelque chose que je ne fais point, une attitude plus juste, qu'importe la chose, pourvu que cette chose guérisse ce corps, qui n'en finit plus de me faire souffrir. "
le camouflé en personne ordinaire lève la tête puis se tait. Le malade désorganisé par cette attitude, reprend :
"Je suis, maître, un malade. J'ai parcouru des milles et déjà payé très cher pour plusieurs remèdes, qui n'ont fait que soulager temporairement ce mal. Je vous serais reconnaissant de bien vouloir me guérir. Je payerai ce qu'il faudra!
Celui qui se cache, se tait encore mais respire profondément.
Le malade pense que l'autre ne veut point de lui, aussi par dépit, il ajoute encore :
" Je suis, monsieur, un malade qui cherche à guérir. J'ai parcouru des milles et des milles et malgré votre déguisement, j'ai su vous reconnaître. Vous ne voulez point m'aider! La belle affaire! Est-ce cela la compassion? La douleur vous ferait-elle peur? "
Celui qui se tait, met un doigt à ses lèvres et dit simplement: " Chut! "
Alors l'homme qui demande assistance, soudain ressent et prend conscience du Silence et le Silence, alors entre en son corps et le fait se sentir bien malgré ses souffrances.
CONCLUSION KOAN
On ne sait combien les maux physiques sont terribles à moins que l'on ne les ressente à notre tour. La sagesse de ce maître enseigne sur le Silence, sans lequel il ne peut y avoir ni écoute ni guérison. En effet, à s'épuiser en voyages et en recherches, toujours on fait du bruit. À force de se définir ou de s'ancrer dans un problème, même s'il s'agit de souffrances, on nourrit ce problème qui prenant désormais toute la place, tout entier nous envahit. Pour celui qui veut guérir, il est donc de première instance, qu'il sache en premier lieu reconnaître, au delà des remous causés par la douleur: le Silence, comme une unique porte ouverte sur l'Infini.
Cécile-Purusha Hontoy, auteure, conférencière
yogui, thérapeute
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